MALTE
Passage dans un concentré d'Europe
Du 2 au 7 novembre,
Nous arrivons à Malte au petit matin. Spectacle magnifique et émouvant, la lumière matinale se reflète sur les édifices de pierre.
Nous retrouvons enfin la terre ferme et commençons par pédaler entre les piles de conteneurs du port de fret de Malte. On a l'impression d'être minuscules. A la sortie, un douanier vise notre certificat de débarquement. Quand il apprend que nous allons jusqu'à la Valette en vélo il est impressionné et nous met en garde: "Attention, ça monte et les automobiles ici roulent n'importe comment. Surtout les camions." Nous revenons d'Inde et trouvons la circulation incroyablement fluide et ordonnée. Il y a même une piste cyclable! On roule à gauche, ça ça n'a pas changé.
Quantité d'émotions nous assaillent lors de ces premiers kilomètres. Il y a ces odeurs familières du bord des routes. La végétation particulière de la Méditerranée, un mélange de fenouil et de fleurs dont j'ignore le nom. On peut rationaliser tout ce que l'on voit, mais l'odorat est un sens beaucoup plus "brut". Cette odeur a déclenché une incontrôlable émotion, celle retour au pays... Les marins du Coral nous avaient expliqué qu'ils sentaient l'odeur particulière de la Méditerranée, totalement différente de celle de la mer Rouge ou de l'Océan Indien. Moi j'ai senti ça sur le chemin. Ici nous passons complètement inaperçus sur nos vélos chargés. On est des européens ordinaires. C'est reposant. Dans le premier supermarché dans lequel nous pénétrons nous avons une impression d'abondance. C'est une vrai caverne d'Ali Baba, des biscuits industriels, du chocolat...Rassurez-vous ce sentiment passe très vite.
Voici une petite carte pour vous situer cette étrange archipel (car il y a au total neuf îlots constituant Malte).
Outre sa vocation de relais commercial et son attrait touristique, la principale ressource de Malte est le calcaire. Les villes sont toute en pierre et il parait qu'il y a de superbes spots d'escalade (que l'on n'a malheureusement pas testé).
Malte est un étrange pays européen. Un mélange de culture assez désopilant. C'est comme une île britannique que l'on aurait transporté en Méditerranée. On est surpris d'y entendre des grands-mères à la physionomie grecque parler un anglais parfait. Les cabine téléphoniques sont rouges et arrondies comme à Londres, et les grandes bâtisses de pierres calcaire ont des fenêtres en balcon de style british. Les Maltais sont catholiques en grand majorité (plus de 97%) et l'île ne compte pas moins de 350 églises. Il y a deux langues officielles, la langue nationale, le maltais (qui est un dialecte arabe métissé d'italien, de français et d'anglais et qui s'écrit en alphabet latin) et l'anglais. C'est une aubaine pour beaucoup d'étudiants en langue. Malte est une destination convoitée pour les séjours linguistiques, pour changer du smog londonien.
Malte c'est un pays timbre poste, à peine plus de 300 km² (figurez vous un pays de la taille du Cap Corse!). Et tout doit rentrer dedans: un aéroport, 100 mètres plus loin un hippodrome, une plage, une mini zone naturelle, des hôtels, des habitations... Tout y est entassé, "esquiché" comme on dit dans le midi; on trouve en moyenne à Malte 1250 habitants par kilomètre carré, à titre de comparaison en France c'est 112 hbts/km² et en Inde 329.
Nous logeons deux nuits à la Valette dans une pension très kitch du nom de "Bonheur" tenue par une mère et sa fille. La mère parle parfaitement français, elle a vécu en Egypte et a eu une vie plutôt mouvementée. Nous trouvons un magasin de vélo où je peux enfin faire expertiser le petit problème aléatoire de craquement que je ressens dans le pédalier. Ce n'est pas grave, sans doute des saletés dans la cassette. Je pourrai faire changer ça en France et rouler sans problème jusque là m'assure le vendeur. Nous achetons une lampe car le système de dynamo ne marche plus mais à part ça il n'y a pas grand chose à faire sur nos deux montures. Le robuste "sanglier" (pour moi) et la fringante "rossinante" (pour Pierre) tiennent bien la route! Nous partons donc faire le tour de Malte. On peut le faire le tour de l'île principale en une journée, mais nous en prendrons deux. Nous nous sommes arrêtés plusieurs heures pour contempler, fascinés, un dresseur et son rapace s'entraînant face à la mer.
Faucon maltais
Nous retrouvons nos anciennes habitudes, pique-nique et bivouac. Pour le pique-nique pas de problème, les boulangeries de Malte font de très bons chaussons au fromage et aux épinards et d'étranges boules de riz garnies, roboratives. Pour le bivouac, ici en novembre c'est un peu plus hard: il fait nuit à 17h et plutôt froid et humide dans la nuit. Par ailleurs Malte c'est dense et on a à peine pu trouver un champ à l'écart de la route. Pour finir il y a les chasseurs de lapins qui sont très actifs (la spécialité de l'île est le ragoût de lapin) et qui font siffler les balles près de vos oreilles dès l'aube... Autant dire que ce n'est pas du "bivouac de charme".
On a trouvé que les routes de Malte ne valaient pas vraiment le coup à vélo: elles sont très fréquentées et les paysages naturels ne sont pas à la hauteur des côtes bien raides qu'il faut gravir. A Malte, là où on se régale, c'est dans les villes. On peut y flâner des heures, l'architecture tout en pierre est magnifique.
Rues de La Valette et de M'Dina
Le six novembre au matin nous quittons notre micro archipel pour rejoindre la grande soeur italienne: la Sicile. Nous sommes à bord du navire à haute vitesse "Maria Dolorosa" très bien nommé pour l'occasion: la mer est agitée et nous sommes malades pendant toute la traversée. Comme quoi, ce n'est pas avec 15 jours de cargo que nous avons acquis le pied marin...